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Fiche de lecture Histoire de la psychanalyse en France – E. Roudinesco

Partie 1 

 

J’ai trouvé cette lecture très intéressante et essentielle à notre travail et à nos autres lectures. Malgré quelques passages laborieux, le contenu étant très dense (et peut-être une petite baisse de motivation estivale), le travail de Mme Roudisnesco m’a semblé d’une telle rigueur et d’une telle exigence. Il est tout à fait pertinent de situer la psychanalyse et son développement dans l’ensemble du contexte de l’époque, et même si parfois il m’a semblé qu’on s’éloignait un peu du sujet, j’ai trouvé tout de même qu’il était fort intéressant d’avoir toutes ces anecdotes sur la politique, la médecine, les croyances ou autres coutumes de l’époque. Je suis ravie de cette lecture qui complète tout à fait bien la lecture des textes psychanalytiques.

 

Je retiens déjà de cette première partie l’insistance de Roudinesco à démontrer le tabou de la sexualité et la virulence de l’époque quant aux thèses freudiennes. Tout au long de ses premières pages, je n’ai pas compté le nombre d’opposants, critiques, voire même de retour en arrière permanent quant aux avancées freudiennes, pour ceux qui s’acharnent à nier l’étiologie sexuelle et défendent coûte que coûte l’hérédité et l’organicisme. A l’époque de Charcot, en 1886, écrit Mme Roudisnesco, « le sexe fait peur ; dans la bouche de Charcot, il est logé à la même enseigne que la maladie contagieuse » (p. 24, Ed. livre de poche, Fayard 1994).

 

J’ai trouvé importante cette remarque quant au fait que « notre époque a forgé une nouvelle manière de « vivre » la maladie : on n’hérite plus d’un mal comme d’un destin, on le « fabrique » dans son corps », et ainsi, « le malade participe à son traitement » (p. 29). Je trouve cela tout à fait juste même si à mon avis, même de nos jours, la maladie est tout de même souvent vécu comme un mauvais coup du sort. Je suppose que cela n’a quand même rien à voir avec les croyances d’il y a plus d’un siècle.

 

  1. Roudinesco reviendra aussi souvent sur toutes ces affaires de plagiat et de vols présumés par Freud aux théories des autres. Elle écourte très bien ceci avec cette remarque : « Freud ne se contente pas de constater ce que tout le mode connaît, en « volant » les idées de ses contemporains, il traduit une évidence par des concepts nouveaux » (p. 37).

De l’ensemble des exposés et détails fournis par l’auteur sur la pensée des contemporains de Freud, ou même des plus anciens, je retiens que seul Freud a réellement perçu la primauté d’un inconscient sur la conscience qui n’est pas toute-puissante. L’importance qu’il donne à la part inconsciente du sujet, alors divisé, c’est tout de même LA découverte freudienne.

Le clivage de la conscience lui permet de se dégager de la question de la simulation et de l’hérédité et de fonder une toute nouvelle discipline et pratique. Quel courage de défendre face aux grands maîtres, tel que Charcot, l’étiologie sexuelle des névroses dans une époque où le sexuel et le génital, souvent confondus d’ailleurs, sont tus. L’histoire nous rappelle aussi que ses avancées majeures ont commencé grâce à la découverte d’une altération fonctionnelle n’ayant pas pour cause une lésion organique (l’hystérie).

A certains moments, je n’ai pas compris la longueur de certains passages ou développements. Par exemple, l’insistance de E. Roudinesco sur la judéité de la psychanalyse. Cela avait-il vraiment une importance ? Ou aussi, sa comparaison aux empereurs romains et autres analogies.

Je retiens aussi les nombreuses fois où elle parle de secte, de maître concernant Freud et quelques autres, de religion, prophète, de horde même etc.. Ce qu’on entend aujourd’hui n’y est pas étranger je pense et ne sert pas la psychanalyse si elle porte, à son origine, cette image là.

Il est vrai que certains exemples, comme le comité secret et l’obligation de ne rejeter aucun concept fondamental de la psychanalyse, laissent peu de place à la critique, au travail personnel et à la recherche scientifique.

 

Je suis d’ailleurs aller voir la définition de « secte ». Le Larousse indique :

  • ensemble de personnes professant une même doctrine (philosophique, religieuse etc.)
  • groupement religieux clos sur lui-même et créé en opposition à des idées et à des pratiques religieuses dominantes
  • clan constitué par des personnes ayant la même idéologie

 

Ce qui manque alors ici, si la psychanalyse est comparée à une secte, c’est la question scientifique de notre discipline. La secte renvoie à la religion, à l’idéologie. A la base, le terme n’est pas forcément péjoratif comme l’acception que nous connaissons aujourd’hui. Il s’agit d’une minorité de personnes qui s’éloigne de la doctrine dominante pour fonder la sienne propre. En ce sens, les différentes écoles de psychanalyse et les différents courants peuvent s’y apparenter. Encore faudrait-il pouvoir sortir de ces questions de « doctrine » et de religion et nous rapprocher du côté scientifique de notre pratique. Nous avons tout à y gagner à mon avis.

 

Ces premières pages nous permettent aussi d’y voir plus clair dans les conflits entre Freud et ses « disciples », et les dérives de quelques uns. E. Roudinesco est sans appel quant à Jung : « La doctrine jungienne était le résultat d’un bricolage théorique, parfaitement ancré dans les préoccupations de l’époque, mais qui n’était en rien comparable à l’innovation freudienne » (p. 163).

 

Il est intéressant de voir comment le mouvement psychanalytique a dû s’institutionnaliser, se fédérer, mais aussi se cadrer, en imposant par exemple, en 1918 seulement, que les psychanalystes devaient avoir effectué une psychanalyse personnelle pour pouvoir exercer.

 

Coté pratique, la rupture avec l’hypnose est évidemment rappelée et je trouve toujours pertinent d’insister sur leur différence fondamentale. Cette rupture suppose le décentrement de la position du clinicienne et le changement de place quant au savoir. C’est le malade qui sait tout autant que le clinicien, voire davantage.

 

J’ai été agréablement surprise de découvrir, ou redécouvrir (je pense l’avoir appris à l’université) que le terme « autisme » dérive du mot auto-érotisme Quel incroyable exemple de la négation même de la pulsion sexuelle comme étiologie des pathologies psychiques !

Au-delà du refus du sexuel, E. Roudisneco nous rappelle aussi la blessure narcissique que représente l’innovation freudienne et donc, les réticences.

 

J’ai découvert à travers cette premier lecture, encore davantage, un Freud peu clinicien finalement. Il avoue clairement ne pas aimer cette positon, et à la fin de sa vie, il ne recevra que des futurs analystes et moins de gens souffrant. Il est clairement attiré et orienté par le développement de sa théorie. On ne peut nier le côté « maître » ici encore. Mais le génie freudien aura clairement davantage été un génie théorique que clinique et ces quelques pages nous le confirment. Y sont décrits aussi la technique de l’époque : les séances d’une heure, puis 45 minutes, l’analyse des rêves et du transfert. Il est vrai que nous sommes éloignés de la méthode d’origine. C’est bien là l’avancée lacanienne si essentielle et qui pourtant, ne vient juste qu’affiner la lecture première de Freud, l’inconscient ne fonctionne pas au temps chronologique, il est une langue, et la parole du patient prime par le savoir qu’elle fait émerger. Comment les freudiens peuvent-ils voir, chez les lacaniens, un scandale de destruction quant à l’enseignement freudien ??

 

Le deuxième écueil qui nous est relaté, après le refus du sexuel, et le refus de considérer le moi autrement que comme tout-puissant. L’Ego-psychology et la psychanalyse à l’américaine iront dans cette voie là d’un acharnement quant au « moi fort ».

 

La dernière partie, quant au développement de la psychanalyse en France, fait la part belle à Janet, « ennemi » de Freud. Les quelques allusions qui se trouvaient des les textes freudiens trouvent ici un large développement. Ce fut très instructif de lire comment Janet s’enfonce dans un marasme où il accuse Freud de « voler » sa théorie qu’à la fois il récuse. Cela n’a ni queue ni tête.

 

Je retiens également la récurrence du mot « pansexualsime », que j’avais aussi un peu oublié et qui renvoie à ce côté, plutôt péjoratif dans la critique, du « tout sexuel » chez Freud. Encore faut-il avoir rigoureusement étudié le travail de Freud et distinguer le sexuel du génital.

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