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Retour sur la naissance du sujet grâce à Solange Faladé

Retour sur la naissance du sujet grâce à Solange Faladé

 

Je vais m’appuyer à présent sur ma lecture des séminaires de Solange Faladé qui retrace en particulier le parcours de la naissance du sujet. Elle nous traduit en quelque sorte ce que Lacan lui a transmis et nous le transmet je dirai d’une façon plus digeste. J’ai tenté de résumer rapidement mais c’est à mon avis précieux pour cerner davantage cette question du reste.

Au départ, nous dit-elle, c’est le Réel. Avant toute symbolisation. Puis le cri, assignifiant, de l’infans, qui va rencontrer un Autre. Jusqu’alors, il n’était que dans la jouissance, dans le Réel de la jouissance. À partir de cette première demande, « du lieu A où sont les signifiants, un signifiant va décompléter cet Autre, et ce signifiant qui décomplète l’Autre, ce sera le sujet »[1]. Lacan l’écrit S, « un signifiant qui s’est barré de ce lieu »[2]. Le sujet se trouve toujours entre deux signifiants, « dans cet écart qui marque la chaine des signifiants dans l’inconscient »[3]. La naissance du sujet est concomitante d’une chute, un objet choit. Le schéma de la division le représente : les conséquences sont les S, le A et le a (reste résiduel).

 

Il y a naissance du sujet, par la première demande donc, et c’est ensuite que par des demandes réitérées, se met en place ce qui est de la pulsion « qui permettra au sujet de saisir ce S(A), ce qui divise aussi le grand A, ce qui lui signifie que, de ce côté-là, il y a du manque[4]. » La pulsion aboutit toujours au ratage de l’objet.

 

Le désir se met ainsi en place chez l’enfant du fait de la répétition des demandes. Cette répétition va faire saisir à l’enfant l’incomplétude du grand Autre. Ce qui de cette demande, n’est jamais satisfait, ne pourra plus revenir du fait de l’Urverdrängung : « Ce refoulement primordial, c’est ce qui n’a pas pu être repris dans la demande, lorsque la première demande a été posée et qu’elle a dû être reçue au lieu de l’Autre, de l’Autre avec ses signifiants »[5].

C’est à partir de la demande, qui est le fait du pur sujet du besoin, que va naître le sujet. Le sujet passe dans le champ de l’Autre, le décomplète, ainsi c’est un sujet barré[6] et l’opération est celle d’une disjonction, le reste est l’objet a. Elle ajoute : « le sujet, c’est la coupure »[7]. Il est intéressant de noter que de ce mouvement, la conséquence en sera le fantasme fondamental qui viendra comme une tentative de suturer cette béance. La traversée du fantasme reproduit d’ailleurs en quelque sorte ce même mouvement premier de disjonction.

 

La naissance du sujet va de pair avec le refoulement originaire et le fantasme fondamental. Une autre façon de le dire : le fantasme fondamental est la conséquence de la division du sujet et de son reste, l’objet a. Le fantasme fondamental a à voir avec ce qui s’est retranché de ce néant[8]. Il est une façon « de boucher, d’obturer cette faille, ce manque, dû à la rencontre du réel »[9]. Voici ce qui résonne pour moi avec ce qui reste. Ce qui reste, c’est aussi ce bout de Réel, de jouissance, à jamais inaccessible.

 

Le reste, c’est évidemment aussi l’objet a qui choit. Le fantasme traversé renvoie d’ailleurs pour Faladé à ce que le sujet ait pu repérer quel objet a il est[10]. C’est uniquement cela qui permet de répondre à la question que suis-je ? La traversée du fantasme lève le voile et implique une disjonction entre S et le a qui permet au sujet de savoir quel est le petit a dont il est le sujet[11]. Le a, tant qu’il n’est pas disjoint, extrait, vient couvrir la castration.

 

Le sujet advient du rien. C’est la relation de sa parole avec ce qui est dans le champ du langage qui fait advenir le sujet[12]. Naître en tant qu’être, au moment de la naissance donc, et naître en tant que sujet, ça n’a rien à voir nous rappelle ainsi Faladé. Le fantasme fondamental est une tentative d’annuler cette distinction, une difficulté à admettre qu’on vient de ce rien. Le fantasme vient voiler que le sujet vient du néant.

 

Ensuite, Faladé explicite le rapport S1-S2. Le passage du S1 (signifiant maître) au S2 (signifiant du manque dans l’Autre S(A)) est déterminant pour la structuration psychique de l’être. C’est un appel à l’Autre pour permettre au S1 de représenter le sujet. C’est grâce au S2, S(A) que le sens sera maintenu pour le sujet. Pour le psychotique, « le S(A) ne sera pas subjectivé puisque la castration n’a pas fonctionné, le grand Autre apparait comme sans manque, comme n’ayant pas cette place vide qui est sa structure »[13]. Cette place vide est nécessaire pour qu’il y ait saisie du sens[14]. Le S2 a à voir avec cette place vide dans l’Autre.

 

Une petite précision importante : le sujet est barré du fait du signifiant ; le sujet est divisé du fait du S2 : le sujet est castré du fait du signifiant phallique. Le psychotique est ainsi lui aussi barré par le signifiant, le Bejahung (que nous pouvons simplifier par le « oui » au signifiant) a lieu. Mais la division et la castration n’opèrent pas pour lui. Le sujet divisé dépend de s’il y a réponse de l’Autre au deuxième appel.

 

Au moment où le sujet dit oui au signifiant « va se mettre en place la Chose, cette vacuole qui se dégage au lieu de l’Autre »[15]. La chose, das Ding, j’y reviendrai tout à l’heure.

 

Les précisions de Faladé concernant la psychose seront très précieuses lorsqu’elle nous dit que le S2 apparaît bien au sujet psychotique, puisqu’il revient dans le Réel, mais il n’a pas été subjectivé. La Bejahung a lieu donc l’appel à l’Autre aussi mais jamais le père ne vient. Pour le psychotique, le Nom-du-Père n’est pas en circulation dans la chaîne signifiante.

« (…) la Verwerfung ne peut être que s’il y a un appel, appel qui fait que le père ne peut pas répondre, qui fait que la fonction paternelle ne peut pas répondre »[16].

 

 

[1] Faladé, S. (1988-89). Le moi et la question du sujet, Paris, Economia, 2018, p. 10.

[2] Ibid.

[3] Ibid.

[4] Ibid, p. 59.

[5] Ibid, p. 40.

[6] Ibid, p. 57.

[7] Ibid, p. 58.

[8] Ibid, p. 285.

[9] Ibid, p. 288.

[10] Ibid, p. 66.

[11] Ibid, p. 288.

[12] Ibid, p. 298

[13] Ibid, p. 82.

[14] Ibid, p. 98.

[15] Ibid., p. 49.

[16] Ibid., pp. 148-149.

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