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Fiche de lecture de l'oeuvre de S. Freud : Tome XII

La disposition à la névrose de contrainte (1913)

 

Ce texte m'a particulièrement intéressé car nous pouvons suivre l'évolution de la pensée de Freud sur une question qu'il tente d’éclaircir depuis bientôt deux décennies : comment se fait pour un sujet le choix de la névrose, en l’occurrence ici celui de la névrose de contrainte ?

Le terme disposition renvoie à une détermination qui est déjà là et qui conditionne le reste, il s'agit de comprendre ici en quoi la disposition névrotique est ici à articuler avec le choix de la névrose. Ces deux questions sont en effet essentielles. D'ores et de déjà dans les lettres à Fliess (lettre du 20 mai 1896), Freud avait supposé que les scènes d’hystérie surviendraient avant 4 ans, celles de la névrose obsessionnelle avant 8 ans, et celles de la paranoïa avant 14 ans. Ce qui conditionnerait le choix de la névrose serait la survenue de l’événement traumatique et non le refoulement.

 

Ce questionnement sera ensuite poursuivi dansL'hérédité et l’étiologie des névroses, Nouvelles remarques sur les psychonévrose de défense et L'étiologie de l'hystérie. Le choix de la névrose dépendrait alors de la position active (névrose obsessionnelle) ou passive (hystérie) à partir de laquelle l'individu a subi l’événement. Ces hypothèses seront abandonnées par la suite.

Ce texte représente ainsi un point de butée majeur dans la réflexion de Freud qui affine peu à peu ses hypothèses.

 

L'auteur débute ce texte en distinguant les causes constitutionnelles des causes accidentelles. La notion de disposition renvoie au fait que la névrose se créé indépendamment des expériences vécues. Freud suppose que les fonctions psychiques (fonction sexuelle et fonctions du moi diverses) passent par « un développement long et compliqué jusqu'à ce qu'elles parviennent à l'état qui est caractéristique de l'adulte normal » (p. 85). Lorsque ce développement bute quelque peu et qu'une fonction se maintient à un stade antérieur, se crée alors un « point de fixation », « auquel la fonction peut régresser dans le cas où l'on tombe malade par suite d'un trouble externe » (p. 86). Ainsi les dispositions sont à entendre comme des « inhibitions de développement » (p.86). Freud revient alors sur son hypothèse de l'ordre de succession des formes de névroses (hystérie, névrose de contrainte, paranoïa) car ces découvertes plus récentes lui font comprendre que la paranoïa correspond à une fixation de la libido à un stade de développement précoce tandis que dans l’hystérie et la névrose de contrainte, la fixation est plus récente. Freud réfute également sur son hypothèse sur le caractère actif ou passif conditionnant le choix de la névrose.

 

Le développement génial laisse place ensuite à un cas clinique d'une patiente ayant d’abord développé une hystérie angoisse, puis une névrose de contrainte. L’hystérie réactivité à la frustration du désir d’enfant laisse place ensuite à la névrose d’angoisse qui survient du fait de l’impuissance du mari. Ce cas pourrait alors contredire sa thèse de la disposition par inhibition de développement « si on ne voulait pas se décider à faire l'hypothèse qu'une personne puisse apporter avec soi dans son développement libidinal plus encore qu'un seul et unique point faible » (p. 87). Freud va alors centrer sa réflexion sur le choix de la névrose de contrainte et s'appuyer pour cela sur l'instauration de « motions érotiques-anales et sadiques » (p. 88) qui seraient apparues du fait de la dévalorisation de sa vie génitale. Ici Freud affine sa théorie des stades libidinaux et souhaite « intercaler » un élément nouveau dans le schéma de développement de la fonction libidinale : « l’organisation prégénitale ». Ce stade correspond au moment où « les pulsions partielles sont déjà regroupées en vue du choix d'objet, où l'objet comme une personne étrangère se confronte déjà à la personne propre (narcissisme) mais où le primat des zones génitales n'est pas encore institué » (p.89). Les pulsions partielles dominantes dans cette organisation prégénitale de la vie sexuelle sont les pulsions érotiques-anales et sadiques.

 

Ainsi Freud repère que dans la névrose de contrainte, ont été repérés comme prégnantes les motions de haine et d'érotisme anal. Ainsi ces pulsions anales, qui apparaissent avant les pulsions génitales dans le développement libidinal, s'y substituent dans la névrose. Et Freud d'ajouter que « la vie sexuelle de la patiente commença à l'age enfantin le plus tendre, par des fantaisies de fustigation sadiques ». Du fait de la dévalorisation génitale vécue dans sa vie d'adulte, la vie sexuelle de la patiente retomba alors au stade infantile du sadisme.

 

Freud poursuit ses remarques et ajoute que l'opposition entre masculin et féminin n'est pas présente à ce stade de organisation prégénitale et que se trouve à la place l’opposition entre les tendances actives et passives (alimentées par l'érotisme anal). Freud fait une troisième remarque sur le caractère et note que chez les femmes vieillissantes s'accentue les éléments obsessionnels sadiques-anaux après qu'elles aient « abandonné leurs fonctions génitales » (p. 92). La dernière remarque de Freud complète l'idée de l’organisation prégénital par deux éléments essentiels : la pulsion de savoir (rejeton de la pulsion d'emprise) et le développement du moi (en référence au travail de Ferenczi sur le développement du sens de la réalité effective). Freud précise très vite que les stades de développement du moi lui sont encore inconnus mais il pose l'hypothèse d'un « devancement temporel du développement du moi par rapport au développement de la libido » (p. 93), dans le sens que le choix d'objet chez le névrosé de contrainte se fait en partant des pulsions du moi, en amont du développement de la fonction sexuelle, qui expliquerait alors l'hypermoralité précoce de l'obsessionnel.

 

Freud finit ce texte en évoquant brièvement le cas de l’hystérie qui serait liée à la derrière phase de développement de la libido (primat des organes génitaux et fonction de reproduction) mais le problème de la disposition hystérique est ici ajournée du fait des lacunes à propos du développement du moi.   

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