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Fiche de lecture de l'oeuvre de S. Freud : Tome XII (suite)

Fiche de lecture de l’œuvre de Freud :

Tome XII (2ème partie)

 

La lecture de cette 2ème partie du XIIè tome des œuvres complètes de S. Freud m'a particulièrement intéressée. Dans «Sur l'engagement du traitement », j''y ai trouvé des données fortes intéressantes sur la clinique de Freud et sa façon de travailler de l'époque, à laquelle nous pouvons comparer notre travail psychanalytique d'aujourd'hui, du moins au sein du RPH. J'y ai trouvé des informations intéressantes quant à la règle de séances manquées par exemple. J'étais aussi très intéressée par le texte « Pour introduire le narcissisme » où j'y ai trouvé l'auteur beaucoup plus affirmé. C'est un texte extrêmement dense, très riche en avancées théoriques et conceptuelle. S'y dessine de plus en plus clairement sa topique de l'appareil psychique et l'apparition du sur-moi. Enfin, sa « Contribution à l’histoire du mouvement psychanalytique » était également tout à fait passionnante pour appréhender l'évolution des ententes psychanalytiques, les créations d'école et l'évolution des idées donnant naissance aux rapprochements et aux divergences dans la communauté psychanalytique. On y sent Freud quelque peu heurté et amer quant aux oppositions et déceptions qu'il a subi.

 

Sur l'engagement du traitement (1913)

 

Ce texte écrit en 1913 est un écrit technique où Freud évoque comment l'analyste doit mener sa cure et engager le traitement avec le patient. Freud y évoque des règles à respecter, à titre de « conseils » pour mener à bien le traitement. L'argumentation se développe en trois parties : le début du traitement, la question des premières informations et la dynamique de la cure.

 

Freud décrit une « période probatoire » de quelques semaines qui lui permet, après avoir vu le patient pendant quelques entretiens, de déterminer si oui ou non la psychanalyse lui est indiquée. Freud aborde ici la question du diagnostic et de l'entretien préliminaire qui permet ce diagnostic sans toutefois nous décrire les critères de sélection. Selon l'auteur, l'hystérie et la névrose de contrainte seraient appropriées à la psychanalyse, à l'instar de la dementia praecox (schizophrénie).

 

Freud note qu'il est déconseillé au médecin de prendre en traitement quelqu'un avec qui il a des liens de connaissances antérieures, sinon quoi « le patient aborde le médecin dans une position de transfert toute prête » (p. 165).

 

Il est intéressant de noter aussi la raison du choix de la position allongé sur le divan, le psychanalyste étant derrière, hors du champ visuel : « je ne supporte pas que l'on me regarde huit heures par jour dans les eux ». La position allongée sur le divan serait-elle alors due aux résistances de Freud ?

 

Freud évoque ensuite des conseils concernant le cadre temporel. Il y évoque la règle des séances manquées, qu'il nomme « location d'une heure », qui demande au patient de régler inconditionnellement la séance. Cela aurait pour conséquence de réduire considérablement les absences occasionnelles du patient. Freud indique ensuite qu'il travaille six jour par semaine (sauf dimanche et jours de fêtes) et suppose que trois séances par semaine par patient suffisent. Il signale « la croûte du lundi » où les résistances du patient se font sentir. Quant au terme du traitement et à sa durée, ils ne sont pas anticipables mais Freud pense qu'il faut informer le malade sur « les difficultés et les sacrifices » (p. 170) que demandera l’analyse. Quant à l'argent, la question doit être traitée avec autant de franchise que les choses sexuelles avec lesquelles l'argent a des liens très étroits. Le psychanalyste est « en droit de refuser de pratiquer un traitement sans honoraire », y compris pour des collègues ou proches. De plus, l'expérience d'un traitement gratuit fait dire à l'auteur que cela est totalement déconseillé du fait du manque de régulation et de l'accroissement des résistances du patient qu'engendre ce traitement gratuit. Freud dira même qu'il est regrettable que les pauvres ne puissent pas avoir accès à la psychanalyse mais que de toute façon le pauvre tombe moins souvent malade et celui qui a un jour produit une névrose ne se la laisse que difficilement arracher. Qu'en penser ?? Il me semble personnellement que ce ne sont pas les patients les plus fortunés qui s'investissent psychiquement le plus dans leur cure.

 

Freud évoque aussi la question de l'abréviation de la cure : « je dois m'efforcer avec angoisse de les obliger aussi à s'arrêter » (p 170). Qu'en penser ? Freud voulait-il du « résultat » ? Freud explique en effet qu'il serait souhaitable que le traitement soit rapide mais qu'il n'en est rien, du fait de la lenteur des modifications psychiques induites par la cure.

 

Freud pose ensuite la question de savoir sur quel matériel commencer le traitement. Là se pose la règle de la libre association : le patient doit dire ce qui lui vient à l'esprit, sans préparer sa séance. L'absence et le refus des idées incidentes relèvent pour l'auteur du transfert qu'il faut aborder avec le patient. Freud liste les multiples résistances du patient lors de sa cure (partage de son expérience analytique avec un proche, refus de la position allongée, paroles au médecin avant ou après la séance etc.).

 

La dernière partie traite des communications à faire au malade. L'auteur affirme qu'il serait condamnable de livrer au patient une solution de symptôme ou une traduction de souhait « tant que le patient ne s'en trouve pas tout près » (p. 181) et considère que tant que le transfert n'est pas établi, aucune communication ne doit être faite de la part du médecin pour ne pas entraîner une fin de cure prématurée du fait des résistances éveillées ou du soulagement procuré trop subitement par ses communications. Selon Freud, le traitement analytique permet au patient de connaître les voies à emprunter pour atteindre sa guérison et de dénouer les résistances qui jalonnent ces voies. La psychanalyse se différencie ainsi donc de la suggestion du fait que c'est grâce au transfert que les résistances parviennent à être surmonté.

 

Le terme du transfert est très présent dans ce texte et devient le levier majeur du traitement psychanalytique.

 

Remémoration, répétition, perlaboration (1914)

 

Le titre de ce texte contient une trilogie de terme essentiel dans une psychanalyse dont les deux premiers sont des notions connues mais le troisième, qui se traduit par le terme perlaborer, constitue une innovation et consiste en la construction finale que permet la psychanalyse.

 

Ce texte aborde en effet les buts de l'analyse, c'est-à-dire les opérations exigibles du patient.

 

Freud part d'un rappel de l’évolution des buts de l'analyse : remémoration et abréaction (catharsis) puis travail d’interprétation et communication au patient en contournant les résistances, enfin analyse des résistances comme dynamique centrale. Après avoir rappelé le modèle de la remémoration, il signale l'irruption de la répétition : « l'analysé ne se remémore absolument rien de ce qui est oublié et refoulé, mais qu'il l'agit. Il ne le reproduit pas sous forme de souvenir mais sous forme d'acte, il le répète, naturellement sans savoir qu'il le répète » (p. 190). Cette « contrainte de répétition » est à interroger en rapport avec le transfert (répétition en lui-même) et la résistance. L'analysé « répète au lieu de se remémorer, il répète en étant soumis aux conditions de la résistance » (p. 191). Ce que répète le patient, ce sont « ses inhibitions, ses attitudes ne servant à rien, ses traits de caractère pathologiques » (p. 191). Le meilleur moyen de dompter la contrainte de répétition et de la transformer en remémoration se trouve dans le maniement du transfert. C'est ce que Freud nomme « névrose de transfert » qui désigne la transformation, sous l'effet de l'analyse, de la névrose proprement dite comme formation symptomatique, en réalité psychique à traiter par l'analyse. C'est donc une avancée décisive : la névrose dite de transfert naît dans et de la cure même.

 

De même, le terme perlaboration marque une avancée conceptuelle et désigne une élaboration spécifique qui s'exerce à travers les résistances. Elle est « cette partie du travail qui a pour effet la plus grande modification sur le patient et qui différencie le traitement analytique de toute influence exercée par la suggestion » (p. 196). La perlaboration est ce qui manque à l'hypnose pour que le traitement soit efficace.

 

Remarques sur l'amour de transfert (1915)

 

Ce texte évoque éclosion de l'amour de transfert, c’est-à-dire une situation génératrice de difficultés où la patiente fait allusion ou exprime directement qu'elle est tombée amoureuse de son thérapeute. L'auteur considère cela comme une résistance au traitement. Il s'agit ici de pouvoir reconnaître les formes et les enjeux de cet amour de transfert, telle une réalité à laquelle donner un statut d'irréel de façon à réinvestir les imagos au profit de la dynamique de la cure. Deux issues sont concevables selon Freud : l'union légitime durable des deux intéressés ou la séparation et l'abandon du travail qui aboutit à la répétition de l'expérience avec un prochain analyste. Freud postule que cet amour qui naît dans la situation analytique n'est pas créée par cette dernière mais il s'agit d'un amour déjà là à l'état latent dont la résistance se sert pour « inhiber la poursuite de la cure » (p. 202). Freud évoque que le consentement à cette demande d'amour tout autant que sa répression est néfaste à l’analyse. Il s'agit de lui laisser sa place et de ne pas l’encourager, soit de le traiter comme un réel irréel. Répondre à la demande de la patiente serait totalement vain car elle « n'est pas capable d'une satisfaction effective aussi longtemps que ses refoulements ne sont pas levés » (p. 205). Il s'agirait alors pour la malade « d'agir quelque chose, répéter dans la vie ce qu'elle doit seulement remémorer, reproduire en tant que matériel psychique et maintenir dans le domaine psychique » (p. 206). Il ne s'agit en effet pas d'un « amour réel » puisqu'il naît de la situation analytique particulière, et il doit permettre au patient, grâce à sa cure, de remonter aux « fondements infantiles » de son amour.

 

Pour introduire le narcissisme (1914)

 

Freud propose ici d'introduire le narcissisme, c’est-à-dire la « libido du moi », dans sa théorie psychanalytique et le déchiffrement de l’inconscient. Le narcissisme serait un « complément libidinal à l’égoïsme de la pulsion d'autoconservation » (p. 218).

 

Freud reprend tout d'abord la notion de narcissisme et pose la question de ce qui le différencie de l'autoérotisme. Selon lui les pulsions autoérotiques sont là dès le début alors que le moi en tant qu'unité doit subir un développement. Il se demande aussi pourquoi distinguer une énergie sexuelle et une autre non sexuelle des pulsions du moi.

 

Freud évoque ensuite les manifestations observables du narcissisme : les paraphrénies, l'hypocondrie, la vie amoureuse où le sujet aimant l'autre s'aime en fait lui-même.

 

Des avancées conceptuelles majeures apparaissent dans ce texte :

 

  • la théorie de la libido : l'auteur distingue libido du moi et libido d'objet, la libido n'étant cédée à l’objet (narcissisme secondaire) qu’après avoir investi le moi (narcissisme primaire)

  • la question du choix d’objet : selon le type narcissique ou selon le type par étayage ( les deux sont en rapport avec les conditions d'amours infantiles)

  • la question du refoulement qui serai saisi du coté du moi

  • la question de l'idéal et la formation d'une instance nommée « moi idéal ou « idéal du moi » (ces deux notions représentent elles la même chose ?) que Freud distingue de la sublimation des pulsions. La formation d'un idéal est en lien avec la causation de la névrose puisque du fait de cet idéal, les exigences du moi augmente et ainsi favorise le refoulement. La sublimation quant à elle permet de remplir cette exigence sans amener le refoulement.

  • Freud évoque une instance qui fait lieu de conscience morale, de censure (le sur-moi ?) qui est le gardien de cette formation idéale du moi.

 

L’auteur conclue son texte en énonçant que « l'on aime alors, selon le choix d’objet narcissique, ce que l'on a été et qu'on a perdu, ou bien ce qui possède les qualités éminentes que l'on n'a absolument pas » et d'ajouter « ce qui possède la qualité éminente qui manque au moi pour atteindre l'idéal est aimé » (p. 244). Ainsi le névrosé qui investit trop intensivement l’objet, et de ce fait retire de sa libido au moi, est alors hors d'état d'accomplir son idéal du moi. Peut se produire alors la guérison par l'amour, où l'objet d'amour a ces qualités éminentes recherchées, que le névrosé préférera à la guérison analytique

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