À propos de la castration symbolique

La castration symbolique est la rencontre de l’être avec sa condition d’être manquant. Bien que la castration symbolique soit concomitante de l’entrée de l’être dans le langage, cette rencontre, jusqu’à l’entrée en psychanalyse, n’est pas pour autant efficiente dans la vie de l’être. Il faudra pour cela qu’il puisse reconnaître et assumer cette castration qui le constitue, lui, et l’Autre. C’est ici qu’opère la cure psychanalytique.

Nous devons à Lacan, à partir des trois registres qu’il a défini que sont Le Réel, l’Imaginaire et le Symbolique, la distinction fondamentale des trois modes du manque d’objet qu’il développe dans un de ces séminaires consacré à la relation d’objet[1]. Il définit la castration (concept emprunté à la théorie freudienne) comme le manque symbolique d’un objet imaginaire : le phallus[2].

L’assomption de la castration[3] symbolique est le résultat d’une cure psychanalytique menée jusqu’à son terme. La cure psychanalytique elle-même participe à introduire la castration[4] ; grâce à sa méthode et par ses techniques, elle offre la possibilité à l’être, y compris son Moi, de reconnaître et assumer sa condition d’être manquant, d’être parlant divisé par le langage. Cette opération sépare l’être du phallus imaginaire et permet une nouvelle circulation libidinale dans l’économie psychique de l’être. Elle change le rapport de l’être à l’objet de son désir : son désir s’appuie sur le manque et aucun objet ne parviendra à le combler. La castration implique « de ne pas trouver à sa place l’objet qu’on cherche »[5]. Par conséquent, le désir est toujours fondamentalement ailleurs que dans l’objet qu’il vise.

La castration symbolique précède la construction d’un Phallus symbolique grâce auquel l’être se soutient de son existence.

Tout au long de la cure, il y a des effets de castration symbolique. Nous les repérons par les transformations que l’être signale, parfois malgré lui, dans son existence : disparition de symptômes, modifications corporelles et vestimentaires, amélioration de la vie sociale et économique. Celles-ci sont la conséquence des changements topologiques, dynamiques et économiques de la circulation de la libido dans l’appareil psychique. Cela a un effet indéniable sur la modification du type de jouissance déjà, la résolution du symptôme ensuite.

La castration symbolique consiste à assumer de vivre avec le manque phallique et elle n’est pas dissociable de la sortie de la cure.

[1] Lacan, J. Le séminaire, livre IV. La relation d’objet, Paris, Ed. du Seuil, 1994, p. 215.

[2] « La castration, que nous cherchons à définir, prend comme base l’appréhension dans le réel de l’absence de pénis chez la femme. »[2], Ibid., p. 218.

[3] Pierre Fédida évoque cette « assomption de la castration » (citant Piera Aulagnier) dans le processus du complexe d’Œdipe, in Fédida, P. Le concept et la violence, Paris, MJW Fédition, 2012, p. 28.

Julie Billouin reprend ce terme (assomption de la castration) et l’élargit au résultat même d’une psychanalyse, in Mortimore, J. Le concept de la castration dans une psychanalyse. Autour des œuvres de S. Freud, J. Lacan et P. Fédida, Paris, MJW Fédition, 2020, p. 170.

[4] Ibid., p. 231.

[5] Faladé, S. (1993-94). Autour de la Chose, Paris, Economica Anthropos, 2012, p. 71.